Xenopoliana, X, 2001
LES VISAGES DE JANUS:
L'HISTORIOGRAPHIE ROUMAINE AU DEBUT DE SIECLE*
Alexandru-Florin Platon
Sans doute que la récente fin de siècle (et, à en croire les calculs
les plus rigoureux, de millénaire) constitue une bonne occasion pour les réflexions
rétrospectives. La coïncidence rarissime de la fin simultanée de deux interstices
augmente considérablement la tentation, même si les historiens savent bien que les
structures d'une civilisation tiennent rarement compte dans leur évolution de pareilles
limites chronologiques. Bien qu'elle n'appartienne stricto sensu à aucune de ses
structures, l'historiographie ne fait pas non plus exception à la règle. De cette
perspective, le vrai moment du changement par lequel devrait commencer l'évolution n'est
pas l'an 2001, mais décembre 1989. C'est à cette époque, à la veille de la dernière
décennie du siècle passé, qu'un cycle a pris fin et qu'un autre a commencé, dont douze
années se sont déjà écoulées. Pour l'historiographie roumaine, le nouveau millénaire
n'est pas de date si récente.
C'est d'ailleurs le repère que nous nous sommes proposés de placer au centre de cet
essai. Notre tentative se justifie non pas par l'absence des réflexions à caractère de
bilan. Car, les dernières années, de telles tentatives n'ont pas manqué, même si elles
ont été plutôt sporadiques, strictement individuelles et sans un appui programmatique
de la part de la confrérie des historiens. Les réflexions souscrites par ªerban Papacostea a l'égard de l'évolution de
l'écriture de l'histoire pendant la période communiste1,
l'"histoire sincère" du peuple roumain proposée par Florin Constantiniu2,
la critique radicale de la mythologie nationale entreprise par Lucian Boia3 -
qui a déclenché un immense scandale, mais aucun débat vraiment consistent, consacré à
l'esprit, aux concept et aux méthodes qui ont orienté les dernières décennies
l'historiographie roumaine - et, récemment, les analyses très pertinentes et exactes du
même phénomène, de même que celles du statut de l'historien, faites par Gh. Platon4,
Al Zub5 et Bogdan Murgescu6, tous ces efforts constituent à cet
égard des preuves éloquentes, mais - il faut le reconnaître avec regret - singulières.
Ce n'est donc pas la carence des réflexions de ce type qui a inspiré les pages qui
suivent. Ce qui nous a poussés à les écrire, c'est plutôt un désir
d'intelligibilité. Ce n'est pas tant la période communiste qui nous intéresse ici (bien
que celle-ci ne puisse pas être contournée), que surtout ce qui se passe aujourd'hui
avec nous et autour de nous. Est-ce que les changements radicaux auxquels nous assistons
depuis plus d'une décennie ont vraiment un sens? Est-ce que le désordre des faits
quotidiens de toutes ces années laisse voir une certaine logique? Quels sont les défis
qui confrontent actuellement l'histoire et les historiens et quelles en sont les
implications sur cette profession en soi? Voila quelques-unes des questions auxquelles les
lignes qui suivent essaieront de répondre, n'en ayant pas d'autre prétention que celle
d'un éclaircissement personnel.
Cette démarche réclame tout de même une comparaison, soit-elle minimale, avec la
période pré-décembriste et même avec celle, beaucoup plus éloignée, d'avant la
guerre, période qui demeure encore aujourd'hui pour beaucoup d'historiens de chez nous un
objet de référence nostalgique. Pour ce faire, nous choisirons deux plans: l'un -
conceptuel - méthodologique, l'autre - institutionnel, plans dont nous examinerons la
"physionomie" par rapport à l'historiographie, tout le long des principales
périodes qui ont marqué durant le XXe siècle l'évolution de notre
historiographie.
1. Nous commencerons par évoquer l'historiographie roumaine de l'entre-deux guerres, afin
de rendre très nettement compréhensible le changement d'option opéré ultérieurement
par le communisme.
2. Le deuxième intervalle pris en considération sera celui compris entre 1948 - 1964/68
qui coïncide dans l'évolution de l'historiographie romaine avec la période du
stalinisme "dur et pur".
3. Le troisième moment auquel on fera référence ici c'est le tournant produit à la
suite de l'avenement de Ceauºescu au pouvoir,
moment caractérisé par la récupération de la dimension nationale de l'histoire,
systématiquement occultée dans la période antérieure. Nous allons insister ici sur les
multiples conséquences de ce changement, tant de la perspective de l'attitude des
historiens roumains envers leur propre métier, qu'envers le régime communiste.
4. Nous finirons par un bref bilan de la situation actuelle, telle qu'elle se présente
douze ans après la révolution de décembre 1989.
Il faut encore ajouter dans ce préambule que la structure
ordonnatrice, fonction de laquelle peut être le mieux comprise l'évolution de
l'historiographie roumaine - de même que celle de toute la culture - est constituée par
le rapport entre l'élément autochtone et celui européen. Les inflexions en sont
évidentes dans chacun des interstices mentionnés.
1. Après 1918, l'historiographie roumaine est entrée sous un signe qui ressemble à
beaucoup d'égards à l'actuel cycle post-décembriste7. Délivrée, pour un
temps, de la tyrannie du politique, et dans les nouvelles circonstances d'après la
réalisation de l'unité de l'État, elle est devenue capable d'associer à l'ancienne
dimension nationale - dans les limites de laquelle elle avait évolué lors de tout le
siècle précédent - une féconde dimension européenne, dans un équilibre et une
symbiose on pourrait dire exemplaires.
Cet agencement n'était évidemment pas nouveau. Ses signes
prémonitoires peuvent être détectés avant aussi, dans diverses circonstances. Sauf
que, dans un siècle dominé jusqu'à l'obsession par l'idéal national, comme le XIXe
siècle l'avait été, l'ouverture totale de la culture autochtone vers l'Europe avait
été mise en attente, sous la pression de l'urgence et de la priorité d'un programme
politique auquel on avait tout subordonné. Comme il est bien connu, l'histoire, le passé
dans un sens générique, a constitué partout en Europe Centrale et de l'Est, pendant le
siècle des Lumières et celui du Romantisme, un facteur extrêmement important dans le
processus de configuration de l'identité nationale des peuples de cette région. Les
Roumains non plus ils n'ont pas fait exception à cette tendance, cherchant dans la
redécouverte du propre passé un moyen de légitimation collective et de constitution des
droits auxquels ils aspiraient. C'est une chose extrêmement importante à retenir, vu le
fait qu'elle ait créé ce que l'on pourrait nommer un vrai paradigme : non seulement
que l'histoire nationale a été investie par les élites du temps d'un rôle du premier
ordre dans la coagulation et l'expression des solidarités collectives, lui ayant
consacré un vrai culte. En égale mesure, ce que l'on s'est proposé de trouver dans le
cadre de cette histoire, ç'a été tout d'abord les faits voués à attiser le
patriotisme de la nation et à rendre celle-ci consciente de la nécessité de
transgresser les divisions sociales et culturelles internes dans le but d'un idéal plus
haut et commun, soit-il l'idéal national, l'indépendance ou la confrontation avec les
ennemis réels ou imaginaires. Autrement dit, l'histoire s'est associée dès le début
chez les Roumains (comme chez les autres nations de l'Europe Centrale et des Balkans) une
forte dimension militante et donc inévitablement politique, ce qui excluait de sa sphère
d'intérêt tout ce qui n'était pas conforme à son programme et à son but8.
La dimension "autochtoniste" de l'historiographie roumaine a donc précédé la
dimension européenne et a indiscutablement tenu le premier plan tout le long du XIXe
siècle, jusqu'avant la première guerre mondiale, même si la relation entre les
deux éléments a connu des oscillations périodiques, des tensions et des disputes.
Héritées en grande partie de l'époque de "Junimea", ces tensions et
oscillations ont tendu parfois à défaire la relation entre l'autochtonisme et
l'esprit européen dans ses directions composantes, n'ayant quand-même pas réussi à
les séparer. En fait, ces directions ont continué de se nourrir réciproquement,
puisque, si la première a été préoccupée, comme on l'a dit, par "la
restitution historique [et] par la récupération des valeurs anciennes",
la deuxième "a entraîné des efforts non moins significations d'insertion de ces
valeurs dans l'universalité"9. Dans le nouveau cadre de
l'après-guerre, la réalisation inattendue du programme national a enlevé, pour un
certain temps, à la dimension autochtone de l'historiographie roumaine, la signification
symbolique qu'elle avait eue jusqu'alors, laissant ainsi l'espace libre à l'affirmation
de l'ouverture européenne. Il existe en ce sens des preuves indiscutables, qu'il s'agisse
de la réception locale de certains courants en vogue à l'Occident - comme par exemple
l'histoire économique et sociale - ou de la création d'une infrastructure
institutionnelle moderne et tout à fait européenne (les instituts d'histoire nationale
et universelle, d'études turques, d'études classiques, etc.), en accord autant avec les
nouveaux besoins du pays, qu'avec les exigences toujours plus grandes du domaine. On
pourrait ajouter aussi l'exemple de la convergence parfaite du point de vue de la méthode
et de la conception de l'histoire entre la plupart des historiens roumains et les
historiens anglais ou français de l'époque, facile à apercevoir si on relit, par
exemple, La mer Noire (Marea
Neagrã) de G.I. Brãtianu10 et la fameuse Méditerranée
de Fernand Braudel11. Ce n'est qu'une des dizaines des preuves qui
pourraient être invoquées à l'appui de ce synchronisme, mais qui montre combien
l'historiographie roumaine était allée loin dans la voie d'une véritable intégration
et affirmation européenne.
Malheureusement ce processus - comme on le sait si bien - n'a pu se dérouler jusqu'au
bout. La période de l'entre-deux guerres s'est avoué pour la confrérie des historiens
roumains, un interstice si fertile que bref. La détérioration du climat politique
interne et international de la dernière partie de la quatrième décennie du XXe
siècle, la menace de la guerre et surtout la recrudescence du révisionnisme dont les
victimes annoncées allaient être les nouveaux États constitués après 1918, tout cela
a imposé aux historiens roumains de nouvelles préoccupations et priorités, situées
dans un écart de plus en plus évident par rapport à l'époque antérieure. Dans le
nouveau contexte, et pour réagir de manière adéquate aux défis de l'extérieur,
l'histoire a réactivé sa traditionnelle vocation militaire, partiellement occultée lors
de la décennie précédente. C'est surtout à la suite des événements tragiques de
l'été de 1940 (quand la partie Nord de la Transylvanie et la Bessarabie ont dû été
cédées à l'Hongrie, respectivement à l'U.R.S.S) qu'on a vu se multiplier les études
et les synthèses concernant les problèmes majeurs du passé national (origine et
formation du peuple roumain, le mouvement d'émancipation nationale des XVIIIe
et XIXe siècles, les droits historiques sur les provinces qui venaient d'être
occupées), dont la réactualisation, à l'usage du public étranger, était considérée
comme essentielle dans la perspective de la future réorganisation de l'après- guerre.
Dans les circonstances extrêmement graves du moment, qui avaient déterminé d'autre part
la réduction au minimum des contacts avec les milieux internationaux, l'historiographie
roumaine est ainsi revenue à l'ancienne obsession nationale du siècle précédent,
s'éloignant de la dimension européenne qui lui avait tant servi jusqu'alors.
L'équilibre symbiotique entre les deux côtés établi après 1918 a été brisé, et
cette rupture allait se montrer par la suite - bien que personne ne le supposât à
l'époque - de très longue durée.
2. L'instauration du régime communiste au début de 1948, à la suite d'une période de
trois ans de transition vers le totalitarisme (1944-1947), a complètement changé la face
du pays, et il en fut de même pour l'histoire et l'historiographie. Sous prétexte de
rendre le passé plus "scientifique", le nouveau pouvoir a vite procédé à la
réécriture intégrale de celui-ci, le situant abusivement sous le nouveau paradigme de
la lutte de classe et en lui ajoutant toutes les (fausses) données qu'il fallait afin de
légitimer à la fois le gouvernement installé par les armées soviétiques et la
nouvelle orientation politique de la Roumanie vers l'Est. D'autre part, étant conscient
de la puissance affective de la mémoire, le régime a pris soin d'éliminer du texte
écrit tout ce qui eût pur rappeler les états de choses si détesté du passé. La
réécriture intégrale de l'histoire a ainsi évolué du pair avec les ciseaux de la
censure, faisant disparaître des bibliothèques les livres qui ne convenaient plus,
sélectant soigneusement ceux qui, tout de même,"allaient" ou en produisant du
jour au lendemain d'autres, nouveaux, faisant passer les valeurs par une grille de
sélection truquée d'avance. L'histoire de l'U.R.S.S. et celle du parti bolchevik -
offerte par le pouvoir, en compensation à tout ce que celui-ci avait dévalisé - sont
devenus les principaux objets d'étude de l'enseignement de tout type, et avec le marxisme
- discipline d'étude inventée ad-hoc mais vouée à une grande longévité - la
pierre de touche de nombreux destins à l'époque et beaucoup de temps après.
Non seulement que tout contact avec l'étranger était devenu impossible, mais - fait sans
précédent - l'histoire même semblait maintenant être menacée par la perte d'identité
et de sa raison d'être : l'esprit national. Préparé par la destruction des
institutions crées avec tant d'effort avant la guerre, et par l'annulation de toutes les
revues correspondantes, le processus de dés-nationalisation s'est manifesté aussi par la
destruction de nombreux monuments du passé.
La nouvelle époque avait besoin d'une histoire nouvelle.
Il est difficile de dire tous les maux auxquels se sont confronté les
historiens roumains pendant cette période. De toute façon, il est certain que les
survivants de la première il est certain que les survivants de la première vague
d'épurations (1947-1950) ont partagé le sort de tout le monde en cette période
accablante, finissant par se rallier - avec résignation - au nouveau cadre, au moment où
ils avaient compris pareils aux autres - qu'il n'y avait plus rien à faire.
3. Leur adhésion définitive au régime - comme d'ailleurs celle de toute la société -
ne s'est pas produite tout de suite, mais seulement après 1964, date à laquelle a
commencé en Roumanie un lent virage nationaliste, en accord avec la séparation du
régime de Bucarest de l'U.R.S.S (une séparation qui n'a jamais dépassé le seuil d'une
autonomie limitée, puisque, de point de vue économique, les communistes roumains ont
continué d'être jusqu`à la fin étroitement liés à la nomenclature moscovite).
Afin de comprendre comment les choses se sont passées en réalité, il ne faut pas
oublier d'abord que c'était la période où l'histoire se montrait à nouveau en plein
jour, au bout de deux décennies d'une dépersonnalisation extrême, et, que, en second
lieu, le caractère fort répressif surtout au début du nouveau pouvoir avait
modelé les consciences beaucoup plus qu'on ne pouvait l'imaginer. Dans ces
conditions, le tournant nationaliste esquissé en 1964 par Gheorghiu-Dej et mis a son terme par Ceauºescu en 1968 a été
unanimement ressenti par les historiens comme une vraie délivrance. Ayant obtenu d'un
seul coup l'adhésion de la société, qu'il avait tant convoité jusqu'alors, le régime
communiste s'est retourné vers l'histoire nationale si méprisée jusqu'alors,
ayant compris que celle-ci était dans les nouvelles circonstances l'unique modalité de
lui assurer non seulement la crédibilité, mais somme toute, la survie politique.
La récupération des origines, la possibilité de repenser intégralement la durée, par
l'annulation des découpages arbitraires du passé et - comme un corollaire de toute la
réévaluation de l'histoire - le renforcement de la particularité de l'évolution
unitaire sont devenues quelques-unes des lignes de force du nouveau discours
historiographique, mettant aussi les bases d'un programme de recherche auquel presque
tours les historiens ont souscrit. Même si le parti communiste s'est habilement servi de
la nouvelle direction afin de se forger un passé honorable et de l'insérer de travers
dans l'évolution historique, en lui conférant ainsi une auréole organiciste, le
compromis n'ait pas paru aux spécialistes roumains si grave qu'il ne puisse être
accepté, du moment où, au prix de cette apparemment minime concession, on leur offrait
la possibilité de remettre leur discipline en ses droits naturels, et de continuer leurs
projets qui avaient traîné si longtemps. Tout le monde avait compris qu'une nouvelle
époque s'ouvrait pour l'historiographie nationale et que ses favorables auspices devaient
être au plus vite exploités et de la meilleure manière.
C'est vrai que tout ce qu'on a réalisé dans cette période de point de vue quantitatif
ne se retrouve pas du côté de la qualité. Des textes essentiels et des contributions
remarquables voisinent avec des improvisations velléitaires et des productions mineures.
D'autre part, la situation de l'histoire au premier plan du discours officiel n'a pas
été doublée d'une liberté d'expression équivalente. On pourrait même dire qu'on a
assisté de ce point de vue à un phénomène contraire : plus l'histoire était
invoquée par le régime, plus sa surveillance devenait rigoureuse.
C'est surtout dans la décennie d'avant 1989 que la politisation excessive de la
discipline a continuellement limité les principales directions de recherche, non sans
restreindre en même temps les possibilités d'expression individuelles. Pareil à la
littérature (et surtout au roman) où le double langage a été durant toutes ces années
une règle préétablie, l'histoire a utilisé à son tour et avec succès le même
procédé, puisque, si rien ne bloquait, au moins formellement, la déviation du texte
prononcé vers certains sujets interdits (le procédé étant tacitement encouragé), tout
texte écrit faisait l'objet d'un contrôle sévère, aucune des questions soi-disant
"délicates" du passé ne pouvant être évoquée sans l'accord du pouvoir et,
éventuellement sous forme allusive.
Malgré tous ces inconvénients, on ne pourrait pas dire que les résultats obtenus n'ont
pas été significatifs. Une nouvelle historiographie, basée sur le facteur national,
s'est développée les trente-cinq dernières années, constituant à coup sûr non
seulement une importante acquisition scientifique, mais, dans les circonstances actuelles
où nous écrivons, un bon point de départ pour d'explorations plus subtiles, en accord
avec les perspectives et les méthodes propres à l'historiographie
"euro-atlantique". D'autre part, les recherches d'histoire sociale - inspirées
par les affinités de clases du marxisme - se sont concrétisées dans des contributions
non moins importantes sur l'histoire de la paysannerie et des rapports sociaux du monde
rural à l'époque de transition du Moyen Âge à l'époque moderne, fort relevantes pour
la maturité à laquelle l'historiographie roumaine était parvenue à l'époque. Les
livres de David Prodan sont, de ce point de vue, fondamentaux et - on peut le répéter -
difficiles à égaler.
Mais on peut se demander si tous ces résultats se sont situés au niveau des exigences
les plus modernes du temps? Autrement dit, est-ce qu'ils attestaient, pendant ces années
du régime communiste, un consensus, fut-il partial, avec l'évolution de
l'historiographie européenne? La réponse en est, à notre avis, négative, à cause
principalement de la pauvreté des contacts avec l'étranger et de l'impossibilité
grandissante d'avoir un accès riche et permanent aux informations scientifiques.
Il n'est donc pas si étonnant que, dans l'isolement qui allait toujours croissant dans la
période d'avant 1989, la communauté des historiens roumains est restée, en général,
étrangère aux débats conceptuels et méthodologiques de la culture européenne, aux
renouvellements épistémologiques de la science de l'histoire ou même à l'élémentaire
possibilité d'un accès permanent à l'information.
Á l'exception de quelques tentatives isolées, l'écho des transformations scientifiques
de l'Occident n'a suscité chez nous aucune réflexion indépendante, aucun débat
collectif, aucun programme commun de travail ou quelque réaction que ce soit. C'est pour
la même raison que le paradigme marxiste de la recherche est toujours resté en vigueur,
continuant d'être formellement respectée, même si don finalisme intrinsèque, sa
préférence pour les catégories larges, non différenciées dans l'analyse sociale et
politique, ont fait voir une inadéquation croissante aux rigueurs de
l'interdisciplinarité et aux modalités plus subtiles d'investigation, spécifiques aux
nouveaux domaines de l'histoire: l'anthropologie historique et culturelle, l'histoire des
élites, etc.
D'autre part, la reconversion sur le facteur national, opérée par l'ancien régime
communiste vers la moitié de la septième décennie, a eu - de manière apparemment
paradoxale - le même effet, ayant limité les possibilités de notre historiographie de
s'ouvrir aussi vers d'autres méthodes et domaines du passé (la vie quotidienne,
l'imaginaire collectif), plus difficiles à ajuster à une pareille problématique.
Nous ne voulons pas reprendre ici une discussion largement présentée ailleurs12,
dans le but d'expliquer comment est-on arrivé à cette reconversion nationale de
l'historiographie roumaine et quels effets a-t-elle eu sur la recherche historique. Pour
le but que nous nous sommes assigné dans ces pages, il suffit de rappeler que, de notre
point de vue, ce n'est pas cette perspective nationale, en soi, qui nous semble
critiquable, mais son utilisation comme instrument politique13, de même que
l'exclusivisme avec lequel - pour diverses rasions - elle a été embrassée. En second
lieu, il faut dire que la coïncidence sur ce plan entre les intérêts politiques du
régime et ceux scientifiques des historiens a eu, au-delà du rapport encore plus serré
des historiens à la sphère de domination du pouvoir, certaines conséquences positives
pour la discipline de l'histoire et pour le statut symbolique et institutionnel de ses
pratiquants. Rappelons-nous par exemple de la transformation de l'histoire en un objet
d'étude privilégié à l'école et à l'université, du soutien généreux (au moins
jusqu'au début des années '60) des recherches archéologiques et des revues de
spécialité ou de la présence constante et massive des historiens dans la vie publique
de temps, dans leur qualité de co-auteurs (ou seulement émetteurs) d'un discours
identitaire où le passé constituait une véritable pierre de touche. C'est très clair
que tout a eu un prix à payer - le prix du silence - et ceux qui l'ont accepté ont été
très nombreux.
Mais pour la majeure partie, ce prix semblait être compensé par la certitude d'une
position sociale et institutionnelle stable et influente, non seulement pour eux-mêmes,
mais aussi pour leur discipline. Il serait cependant injuste de mettre cette adhésion de
la communauté des historiens à la politique de parti seulement sur le compte de mesquins
calculs d'opportunité. En réalité, ces calculs sont beaucoup plus complexes et pas
toujours faciles à systématiser. Certainement, un rôle important a été joué ici par
la dissociation que la majeure partie des honnêtes gens de la communauté a opérée
entre la profession proprement-dite et la propagande de parti: en pratiquant l'histoire
nationale, la plupart de nos spécialistes éprouvaient la conviction qu'ils faisaient
effectivement leur métier, tout en servant une cause au-delà de toutes contingences et
qu'ils ne jouaient pas le jeu du régime. Ce qui a encore compté - au-delà du fait que
la récupération de la dimension nationale du passé avait associé au communisme un
nimbe de légitimité qui décourageait toute opposition évidente - c'est aussi
l'impression, non point dépourvue de bien-fondé, conformément à laquelle la
valorisation nationale de l'histoire semblait d'autant plus organiquement et naturellement
associée au parti communiste qui l'avait remise en ses droits après 1965/68, que de
cette façon on avait recouvré la prestigieuse tradition des XVIIIe et XIXe
siècles, qui avait fait de cette discipline son livre de chevet. Se révolter donc alors
contre un régime qui avait remis le passé national en ses droits normaux constituait un
acte lourd à assumer et, de point de vue psychologique, pratiquement impossible.
4. Aujourd'hui, douze ans après la chute du régime en 1989, le statut de l'histoire et
de ses pratiquants se trouve, à de nombreux points de vue, à l'antipode de la période
précédente. En tout cas, ce statut passe par un changement radical dont le point
terminus est encore difficile à apercevoir. L'interprétation optimiste de ce changement
peut certainement invoquer beaucoup de signes encourageants. La disparition de la censure,
par exemple, permet maintenant une totale liberté d'expression, ouvrant à la recherche
des possibilités illimitées d'affirmation, à commencer même avec l'histoire la plus
récente qui a d'ailleurs fait l'objet de nombreuses explorations. D'autres part, les
positions institutionnelles de l'histoire semblent s'être beaucoup améliorées, tant par
la multiplication des facultés de profil et l'augmentation du chiffre d'étudiants, que
par l'intégration dans des instituts et des universités d'une nouvelle génération de
spécialistes, capable d'assumer, avec toute la rigueur exigée, les responsabilités de
la profession. Les contacts internationaux se sont aussi amplifiés et diversifiés,
facilitant, à un point jusqu'ici inconnu, la libre circulation des gens, l'élaboration
de projets communs et, en premier lieu, les stratégies de formation et de recherche
presque absentes (ou extrêmement rares) aux années précédentes. De plus, dans le cadre
de la communauté des historiens, les hiérarchies ont été, en grande partie,
reconstruites, selon le critère de la compétence, ce qui a ramené au devant de la
scène des professionnels de haut talent et de caractère, pour remplacer - comme il
était naturel - les anciens fonctionnaires idéologiques.
Mais, il y aussi un revers de la médaille, de nature à inspirer, à notre opinion, de
sérieuses inquiétudes. Il est vrai, par exemple, que les circonstances des dernières
années ont favorisé les progrès de la recherches, mais cela s'est reflété plutôt
dans le niveau quantitatif que dans celui qualitatif. Nous ne pensons pas seulement à
l'abondance de productions historiographiques sous-médiocres parues pendant toutes ces
années, dont la multiplication a été encouragée par l'abandon de l'esprit critique et
par l'absence de décision dans l'élaboration et l'application de standards de valeurs
nettes. Au fond, une telle évolution était prévisible dans les conditions où la
promotion académique dépend encore non seulement de la qualité des livres et des
études publiés, mais aussi de leur quantité (bien que, correctement parlant, nous
devions reconnaître qu'un critère quantitatif ne peut manquer aux grilles
d'évaluation).
Nous pensons tout d'abord au fait que la liberté d'expression s'est traduite dans le plan
historiographique par le droit de quiconque d'écrire n'importe quoi et surtout n'importe
comment, sans aucune responsabilité, pour ne plus parler de bonne foi ou de rigueur
professionnelle, qualités si importantes tout de même dans une profession telle que la
nôtre. Ces carences nous semblent évidentes surtout dans la manière dont on a analysé
lors des dernières années le mouvement d'extrême droite (ou "légionnaire")
et le régime de Ion Antonescu, au sujet desquels on a écrit avec beaucoup de parti-pris
apologétique, ce qui n'a pas contribué à une meilleure compréhension de ces problèmes
soit occultés, soit traités d'une façon nettement nationaliste par le régime passé.
C'est aussi la raison pour laquelle, malgré douze ans de liberté politique et malgré un
accès beaucoup plus large aux documents internes et externes, la seule monographie solide
consacrée au phénomène de l'extrême droite dans la société roumaine n'appartient pas
à un historien roumain mais à un étranger. Il s'appelle Armin Heinen14. Les
exemples de ce genre sont forts nombreux et ils en disent long sur le dilettantisme qui se
fraie à cette heure son chemin dans l'historiographie, profitant de la sus-dite
débilité de l'esprit critique. Pour ne plus parler, hélas, d'imposture.
Ce qui est incomparablement plus dramatique c'est le fait que cette croissance
exponentielle de la production historiographique ne se double pas d'un renouvellement
conceptuel et méthodologique fort nécessaire après une si longue période de figement
épistémologique. En fait, il aurait été plus correct de dire non pas
"renouvellement", mais "construction", pour autant que la dimension
théorique de notre historiographie sous le communisme ait été - pour des raisons
mentionnées dans la section précédente - toujours déficitaire. Paradoxalement, les
liens de la dernière période avec les milieux académiques internationaux n'ont pas
réussi non plus à imposer une pareille orientation autrement que de manière marginale
bien que, normalement, cela eût dû se produire. Au bout de plus d'une décennie de
liberté, notre recherche historique reste donc éminemment empirique, malgré toutes les
tentatives, assurément méritoires et encourageantes, de valoriser chez nous aussi, par
rapport à notre documentation, les suggestions thématiques et méthodologiques des
historiographies voisines.
Et pourtant, à une première vue, cette pauvreté théorique aurait eu toutes les
conditions pour être, sinon évitée, au moins limitée avec le temps par le
développement spectaculaire - après 1989 - de l'enseignement historique universitaire.
Le fait que, à la différence de la période précédente, lorsqu'il n'y avait que trois
facultés d'histoire qui donnaient environ 100 diplômés chaque année, aujourd'hui on
compte 15 facultés (d'État et privés) avec plus de mille diplômés15, en
est, de ce point de vue, la preuve la plus éloquente. Malheureusement à ce chapitre
institutionnel non plus l'évolution quantitative n'a pas été renforcée par un
changement quantitatif. Laissant de côté les personnes qui illustrent après 1989 la
discipline de l'histoire dans les nouveaux centres d'enseignement supérieur, et tenant
compte seulement des conditions nécessaires à une pareille démarche (bibliothèques,
centres de documentation, musées, etc.) il est évident que les nouvelles universités ne
peuvent pas assurer une formation compétitive. Les contraintes financières jouent ici
comme partout ailleurs un rôle immense, mais elles ne sont pas les seules (quoique de
loin les plus graves). Il serait tout de même profondément injuste de mettre la
dramatique diminution de la qualité de l'enseignement historique dans les Universités
seulement sur le compte de ce coefficient d'augmentation. Les vieilles Universités, n'en
ont pas été, elles non plus, exemptes, ce phénomène tendant parfois à prendre des
proportions alarmantes. Les explications en sont multiples et ne tiennent pas seulement à
la qualité des personnes ou à leur éthique professionnelle. En réalité, on a à faire
ici à un vrai "réseau" de causes qui se tissent et s'influencent
réciproquement, mais qui ne sont pas toujours faciles à cerner en leurs dimensions
réelles. Nous allons découper de ce "puzzle" seul un petit fragment, afin de
faire voir leurs ramifications.
Il faut d'abord dire que les exigences financières dont on vient de parler ont contraint
toutes les facultés à augmenter de façon substantielle le nombre de leurs étudiants,
dans les conditions où celle-ci était la seule possibilité d'obtenir des revenus
supplémentaires, en dehors du budget d'État. L'enseignement à taxes, récemment mis en
place, a eu les mêmes effets, faisant augmenter les effectifs des étudiants au-delà du
seuil auquel on pouvait assurer une corrélation acceptable avec la base matérielle de
l'institution et avec les possibilités physiques du corps enseignant. Comme suite à
toutes ces augmentations, celle du nombre des heures de cours qui en a résulté (heures
payées, mal payées ou non-payées) a non seulement rendu de plus en plus difficile le
dialogue avec les étudiants, mais elle a aussi compromis les chances d'une formation de
spécialité "personnalisée" et de qualité, dans le contexte d'un enseignement
universitaire à une tendance de masse de plus en plus prononcée.
Le drame de cette situation a été d'autant plus marqué que cette multiplication des
effectifs n'a pas été accompagnée - comme il aurait été nécessaire - par la
reconfiguration correspondante des curricula. Pour une bonne période, celles-ci sont
restées inchangées, ce qui a encore aggravé le déficit de qualité. Pour ne plus
parler ici du cumul de normes, tant dans l'enseignement d'État que dans le privé (pour
des raisons - hélas! - toujours financières) qui a eu le même effet, enlevant aux
professeurs le temps nécessaire à un travail soutenu et de haute qualité. Un prix
semblable a dû être payé, quelque bizarre que cela puisse paraître, pour pouvoir
assumer les responsabilités qui résultaient des nouveaux impératifs du statut
académique. Avant 1989, ce que nous appelons aujourd'hui le côté administratif ou
"managérial" de l'enseignement se réduisait à une fonction sinon décorative,
alors certainement exécutive, dans la mesure où la marge d'action de ceux investis de
pareilles responsabilités (doyens, chefs de départements) était sévèrement limitée,
et réduite le plus souvent à la mise en ¶uvre des décisions du parti communiste. La
révolution de décembre 1989 a apporté, de ce côté aussi, des changements radicaux. La
loi sur l'autonomie universitaire, l'apparition des programmes internationaux de
financement de l'enseignement académique, les nouvelles opportunités apparues à la
suite de la coopération avec les milieux académiques de l'étranger - bref, ce que nous
nommons par un seul mot (souvent démonétisé) "réforme", a mis les
enseignants dans la situation de devenir, tout d'un coup, directeurs de projets,
directeurs de programmes et des "bâtisseurs" institutionnels, tout cela
représentant des responsabilités pour lesquelles personne ne les avait préparés
auparavant. Les effets de cette situation ont été divers, mais pas toujours positifs. Il
est vrai qu'il y a des enseignants qui ont atteint des performances remarquables de ce
point de vue, s'étant découvert de vraies vocations de réformateurs. à long terme,
cependant, la dé-professionnalisation demeure pour nous tous une grave menace, dans les
conditions où la complexité et le nombre toujours croissant des sollicitations
administratives réclament un investissement de temps et d'effort qui ne laisse plus aux
personnes concernées par ces projets et travaux la possibilité de se consacrer avec la
même énergie aux projets d'enseignement et de recherche. Or - on ne doit pas l'oublier -
les critères de promotion dans le système académique sont élaborés (et à bonne
raison) non pas en fonction des activités administratives, quelque méritoires qu'elles
soient, mais de la réalisation de ces projets. C'est pourquoi à ce moment en Roumanie le
choix auquel se confrontent les universitaires a un caractère si dramatique et essentiel
à la fois: non seulement parce que les deux termes de l'option (science vs
administration) sont, dans les circonstances actuelles, également importants, mais aussi
parce que ce choix, une fois opéré, a toutes les chances de rester définitif. Cela nous
apparaît comme un des dilemmes quasi-insolubles de notre temps. C'est à la fois un des
facteurs de la dépréciation qualitative de l'enseignement supérieur.
Pour compléter ce tableau, il faut encore ajouter que les difficultés auxquelles se
heurtent aujourd'hui les historiens (avec des répercussions sur l'historiographie) sont
aggravées aussi par une transformation d'ordre symbolique: la perte de leur prééminence
dans l'édification du discours identitaire et la position de second rang dans la
compétition académique et de status avec les nouvelles disciplines humaines
ravivées ou apparues après 1989: la sociologie, la psychologie et surtout les sciences
politiques. Nous ne voulons pas trop insister la-dessus, bien que cet angle soit à lui
seul suffisamment important pour pouvoir associer aux avatars contemporains de l'histoire
un plus d'intelligibilité.
Comme tous les domaines de la transition, l'histoire et l'historiographie ont, eux aussi,
un double visage, qui défie les caractérisations trop tranchantes et les bilans précis.
En fait, ce n'est pas d'une "transition" qu'il s'agit ici (ce terme supposant
une durée limitée), mais de la construction hésitante d'une nouvelle société, d'un
nouveau système politique et d'une nouvelle culture (en sens anthropologique), tous les
trois étant des processus qui rappellent la modernisation commencée lors de la seconde
moitié du XIXe siècle et qui, dorénavant, ont toutes les chances de
s'étendre au moins sur l'espace d'une génération. Cette ressemblance nous semble tenir
de plusieurs points de vue. Á l'époque, tout comme aujourd'hui, l'édification du
nouveau système s'est fait avec les gens de l'ancien système. Aujourd'hui, comme alors,
les formes tendent à avoir une nette précédence sur le fond et même à
le créer. Á l'époque, comme de nos jours, la force motrice de cette construction est
moins représentée par les initiatives individuelles et par la pression sociale exercée
d' "en bas", que par les injonctions d'en haut, celles du législateur.
Enfin, aujourd'hui comme autrefois, le résultat global, mais encore provisoire de cet
immense processus, c'est ce que l'on pourrait nommer une "société de
transition" (non pas en sens chronologique, mais structural) où
l' "ancien" et le "nouveau", le définitif et le provisoire,
l'essentiel et l'accessoire se côtoient et se mêlent à tous les niveaux et dans toutes
les hypostases. Notre discipline, pouvait-elle se soustraire à cette ambiance?
Aurait-elle pu avoir un autre visage? Nous sommes enclins à croire que non.
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1 Captive Clio: Romanian Historiography under Communist Rule, "European History Quarterly", vol. 26 (1996), pp. 181-209.
2 O istorie sincerã a poporului român (Une histoire sincère du peuple roumain), Bucarest, Ed. Univers Enciclopedic, 1997.
3 Istorie ºi mit în conºtiinþa româneascã (Histoire et mythe dans la conscience roumaine), Bucarest, Humanitas, 1997 (la 2ème édition est parue en 2000).
4 La société roumaine et la gestion du passé historique, "Nouvelles Études d'Histoire", X, 2000. Publiées à l'occasion du XIXe Congrès International des Sciences Historiques, Oslo 2000, pp. 43-53.
5 Orizont închis. Istoriografia românã sub dictaturã (Horizon clos. L'historiographie roumaine sous la dictature), Iaºi, Institutul European, 2000.
6 A fi istoric în anul 2000 (Être historien en l'an 2000), Bucarest, Ed. ALL Educaþional, 2000.
7 Pour les considérations qui suivent, voir aussi nos textes, Valorizare naþionalã ºi deschidere europeanã în istoriografie. Cazul românesc (Valorisation nationale et ouverture européenne en historiographie. Le cas roumain), "Dacia Literarã", Nos 1-2/1991, 1-2/1992 et Despre desincronizarea discursului istoriografic (Sur la désynchronisation du discours historiographique), "Xenopoliana", I, Iaºi, 1993, 1-4.
8 Pour ce qui est de cette fonction de l'histoire chez les Roumains et, en général, chez toutes les nations de l'Europe Centrale et de sud-est, voir Anne-Marie Thiesse, La création des identités nationales. Europe, XIXe-XXe siècle, Paris, Les Éditions du Seuil, 1999.
9 Ces informations et celles qui suivent, chez Al. Zub, Istorie ºi istorici în România interbelicã (Histoire et historiens en Roumanie de l'entre-deux guerres), Iaºi, Junimea, 1989, passim.
10 G. I. Brãtianu, La mer Noire. Des origines à la conquête ottomane, Paris, 1969 (avec deux éditions roumaines, dans la traduction de Michaela Spinei et annotées par Victor Spinei, Bucarest, 1988 et Iaºi 2000).
11 Fernand Braudel, La Méditerranée et le monde méditerranéen à l'époque de Philippe II, 1ère éd, Paris, 1949 (une édition roumaine est parue en 1985-1986). Pour ce qui est de la similitude de forme et de conception entre les deux monographies, voir aussi notre étude, Gheorghe I. Brãtianu et Fernand Braudel, "La mer Noire" et "La Méditerranée": Parallélismes et convergences, "Revue des Études Roumaines", XVII-XVIII, Paris-Iaºi, 1993, pp. 73-83.
12 Voir Alexandru-Florin Platon, Despre desincronizarea discursului istoriografic (Sur la désynchronisation du discours historiographique)., loc. cit., passim.
13 Cette manipulation politique ne doit être imputée à tous les historiens, mais, tout au plus, à ceux parmi eux qui faisaient de façon délibérée et ostentatoire le jeu du pouvoir, par les fonctions qu'ils détenaient dans l'appareil idéologique et de propagande du parti.
14 Legiunea "Arhanghelului Mihail". O contribuþie la problema fascismului internaþional (La légion de l'Archange Michel. Une contribution au problème du fascisme international). Traduction de l'allemand en roumain par Cornelia et Delia Eºianu. Contrôle scientifique, Florea Ioncioaia, Bucarest, Humanitas, 1999 (la version originale, en allemand, est parue à Munich, en 1986).
15 Voir Bogdan Murgescu, op. cit., p. 95.